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Etre indemnisé pour la contrefaçon d'une marque que l'on n'exploite pourtant pas ?

Le 03 avril 2020
Le droit européen permet au propriétaire d'une marque, déchu de ses droits sur celle-ci, d'agir en défense de ses anciens droits sur la marque pour la période précédant ladite déchéance (en l'espèce, action en indemnisation pour contrefaçon ou imitation)

Un litige a opposé deux sociétés commercialisant des alcools. La première est propriétaire de la marque "Saint Germain", qu'elle n'exploite pas. La seconde utilise le nom "St-Germain" sans autorisation du propriétaire de la marque précédemment évoquée.

Une action en contrefaçon a été intentée par le propriétaire de la marque. Mais de son côté, le concurrent a agit en déchéance de la marque à l'égard de la société propriétaire. [Le Code de la propriété intellectuelle prévoit que le propriétaire d'une marque qui n'exploite pas celle-ci par un "usage sérieux" pendant une période ininterrompue de 5 ans, risque d'être déchu de son droit exclusif et donc de la protection apportée à sa marque.]  

La justice française a constaté que le propriétaire de la marque était déchu de ses droits, en l'absence d'un usage sérieux de celle-ci durant 5 ans. Pour autant, l'ancien propriétaire n'a pas renoncé à son action en contrefaçon, bien décidé à être indemnisé pour la contrefaçon (ou à tout le moins, l'imitation) de sa marque, subie jusqu'au jour de la déchéance de ses droits.

Le Tribunal de Grande Instance et la Cour d'Appel l'ont débouté, refusant que le propriétaire ne soit indemnisé pour la contrefaçon d'une marque qu'il n'exploitait même pas lui-même.

Le propriétaire s'est pourvu en cassation et la Cour de Cassation a interrogé par question préjudicielle la Cour de Justice de l'UE afin de savoir si le droit européen permet à un propriétaire de marque - n'ayant jamais exploité celle-ci et qui se trouve déchu de ses droits à ce titre - de conserver le droit d'agir en indemnisation pour le temps durant lequel, n'étant pas encore déchu de ses droits, la marque a été contrefaite ou imitée.

Le juge européen a répondu à la Cour de Cassation que le droit européen n'entrave pas le droit de l'ancien propriétaire de la marque à agir en indemnisation pour la contrefaçon de la marque sur laquelle il détenait un droit exclusif, alors même qu'il s'en retrouverait déchu depuis.

Reste à voir si la Cour de Cassation qui devra trancher le litige, suivra scrupuleusement l'avis du juge européen et censurera la décision jusqu'alors retenue par les juridictions françaises.

CJUE, 26/03/2020 (C-622/18)